Jean-Pierre Siméon
GIBRALTAR* Ceux-là ne vont pas à la mer pour la mer pas pour nouer leurs rires à la gerbe des vagues pas pour cuire leur sommeil sur le sable ils sont devant la mer debout sous la nuit sans étoiles comme devant l'abîme derrière eux la terre qu'ils aiment harassée dépourvue où il n'y a de choix qu'entre la mort et la mort devant eux rien la mer immense un abîme à franchir comme on doit bien franchir le désespoir ils savent que leur barque est plus fragile qu'un rêve ils savent que là-bas peut-être à l'autre bout du vide la mer recrachera leur corps sur le sable froid ils savent debout devant la mer Ici Jean-Pierre Siméon Cheyne éditeur * à rapprocher des drames récents de Lampedusa et Malte