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Affichage des articles du février, 2018

Philippe Jaffeux - Un Alphabet dans les annales

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Un livre qualifié de «  proliférant et multiforme  » (C.Vercey), «  vertige lucide  » (F.Huglo), « nouvelle énergie » et «  une des plus grandes entreprises littéraire du temps  » (J-P Gavard-Perret), ne peut qu'intriguer et inviter à la découverte. A contrario, le même livre, un pavé de près de deux kilos, au format 21x29,7 pourrait faire fuir. Mais ce nouvel Objet Littéraire Non Identifié mérite vraiment les hommages qu'il reçoit un peu partout. Philippe Jaffeux, qui affirmait «  Le propre de l'homme est de se salir au contact d'une parole transparente  » 1 n'hésite pas à nous nettoyer l'esprit avec toute l'encre des manques, interstices et pages blanches. Revenir aux fondements non pas de la langue mais de la civilisation : l'alphabet (mais qui du chiffre ou de la lettre fut le premier?), et y tenter la fission avec les nombres. Une nouvelle forme de poésie géo[poé]métrique non affiliée à l'Oulipo mais bigrement assistée par les ordinateu

Eric Godichaud – Le cabinet de curiosités

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La revue Décharge publie dans sa collection Polder « Le cabinet de curiosités » d'Eric Godichaud. Quand l’imagination fait plaisir à lire...que tous les curieux de littérature et de poésie se précipitent sur ce petit ouvrage. Un cabinet de curiosités désigne, du XVI e au XVIII e siècle, des lieux où sont regroupés de multiples objets rares ou étranges représentant les trois règnes de la nature (mondes animal, végétal et minéral), ainsi que des objets créés par l’homme (œuvres d’art, instruments scientifiques, armes, etc.). Ils s’organisaient généralement en quatre catégories : artificialia ( objets créés ou modifiés par l'Homme : antiquités, œuvres d'art) ; naturalia (créatures et objets naturels, avec un intérêt particulier pour les monstres) ; exotica (plantes et animaux exotiques) ; scientifica (instruments scientifiques). La visite d’un cabinet de curiosités est toujours un enchantement pour les petits comme pour les grands. L’app

Corinne Pluchart - Fragments

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C’est toujours un plaisir de lire un premier ouvrage, de découvrir un nouvel univers, un style naissant même avec quelques menues maladresses mais surtout avec de belles promesses. Corinne Pluchart publie son premier recueil aux éditions Vagamundo et nous invite en son pays des Marches de Bretagne, autour du Mont-Saint-Michel, pour une promenade intime dans des paysages de pierre et de sel pour marquer sans doute la rugosité des jours. Le recueil s'ouvre sur une déflagration, quelques fissures dans l'azur, une fin qui ne serait qu'un début, dans la fulgurance d'un " éparpillement contre la mer " d'une centaine de fragments poétiques. Fragments d’aubes face à l'horizon à la recherche des passages de lumière avec la présence de l'ange du mont et des " fracassements de mer ". " fragments de lieux " imprimés dans l'intime " la mer dans le creux du ventre ", " tremblements de chair ", tiraillements et

Sammy Sapin - Deux frères

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Est-on jamais frère? Même frères, l’est-on vraiment? Fraternité (et sororité aussi) veut-elle dire forcément mêmeté d'être? Sammy Sapin, dans son ouvrage “Deux frères”, publié en Polder n°171, ne s’attaque pas à cette analyse philosophique. Il fait mieux, il en fait de la poésie en croisant deux destins et en les décrétant frères. Deux frères sans réelles ressemblances : Ludwig Wittgenstein (1889-1951) et Charles Bukowski (1920-1994). Pas beaucoup de points communs, juste peut-être deux trajectoires dans le siècle autour de la mort. Aussi sans doute, deux influences importantes sur les écrivains actuels. Adepte de la realpoetik, Sammy Sapin, poète lyonnais né à Caluire et Cuire, nous propose donc deux biographies pour le prix d’une. Dans un style fluide, sans jugement, sans pointer ni bien ni mal, sans chercher à tout prix les rapprochements, deux biographies en miroir d’hommes lucides sur la vie et sur eux-mêmes. A l'âge de huit ans Wittgenstein se posa sa

Georges Guillain - Parmi tout ce qui renverse

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Avec Parmi tout ce qui renverse , Georges Guillain vient achever le cycle commencé avec Compris dans le paysage (Potentille, 2010), complété par Avec la terre au bout (Atelier La Feugraie, 2011). Cet ouvrage, Georges Guillain, habitué des rencontres avec le public avec son Prix des Découvreurs, a souhaité le diviser en trois parties, dont la troisième vise à apporter quelques précisions sur son travail et sur les circonstances de son écriture pour un peu accompagner le lecteur sans vouloir lui imposer quoi que ce soit. Georges Guillain privilégie cette démarche de passeur qui distribue quelques clés, plutôt que de se couper d'un lectorat toujours disposé à découvrir la poésie contemporaine. Car souvent par trop de références culturelles, certains poètes se coupent d'un lectorat potentiel qui se sentent perdus à la lecture. Ici, tout le monde ne connaît pas le Libro dell'arte, le château de Lacoste, ni la Via del lupanare, ni Aimé Bonpland, tous regroupés dans cet o

Philippe Mathy - Veilleur d'instants

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Philippe Mathy, poète belge né en 1956, partage sa vie entre la Belgique et Pouilly-sur-Loire en Bourgogne Nivernaise. Ce n'est donc pas étonnant qu'il aime à collectionner les instants passés au bord de la Loire. Son dernier ouvrage, intitulé Veilleur d'instants est d'emblée placé sous la protection de Cesare Pavese. Mais ce titre n 'est pas sans rappeler aussi celui de Gilles Baudry Demeure le veilleur (penché sur l’horizon de la promesse )... Chez Mathy, cet horizon de la promesse pourrait être cette collection d'instants qu'il accumule au bord du fleuve, comme une pêche miraculeuse, pour mieux approcher l'universel voire l'éternel d'une forme constructive de la mélancolie. Cette " Porte ouverte / sur des chemins perdus " , sur cett e " lumière désemparée " et cette “ attente dévastée / de nos espoirs ”. " Où vont nos jours ? / Où vont nos nuits ?" “ Où se retrouver, / quand les jours sont / des bar

Guénane - Atacama

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C'est un détour vers le désert d'Atacama que nous proposent Guénane et son éditeur La Sirène étoilée. Car en effet, après " La sagesse arrive toujours en retard " publié chez Rougerie et " Le Détroit des Dieux " édité par Yves Perrine (La Porte), Guénane, grande voyageuse et amoureuse de l'Amérique Latine, nous emmène dans ce désert chilien parmi les plus arides de la Terre. Ayant eu déjà l'occasion à plusieurs reprises de lire des ouvrages de Guénane, j'ai choisi d'attendre un jour gris pour entrer dans sa dernière publication aux éditions La Sirène étoilée : Atacama. En effet, Guénane aime à nous faire voyager entre Bretagne et Amérique du Sud et je savais que j'allais retirer du soleil de ma lecture par temps maussade. " Pressentir est une émotion ", l'incipit de cet ouvrage fait bien le lien entre ce qu'on ressent face aux mystères de la nature qui nous dépassent mais aussi lors de la lecture d'un ou

Sophie G. Lucas - Moujik moujik suivi de Notown

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Les éditions La Contre Allée ont la bonne idée de rééditer en un seul volume les recueils de Sophie G.Lucas Moujik moujik diffusé en 2010 et Notown sorti lui en 2013. Entre poésie et documentaire d’indignation, l’auteure nantaise a choisi de poser ses mots au ras du sol dans les villes, là où le regard ne porte pas, et où vivent de nombreux sans abri. Avec tout d’abord nos SDF français et puis la descente irrémédiable d’une ancienne ville phare des USA : Détroit, dite Notown. Quand la poésie naît d’une colère et d’une impuissance. Quand la poésie décrit aussi notre monde tel qu’il se montre, noir, impersonnel, impitoyable pour les faibles. Quand la poésie dénonce notre passivité devant les morts de froid dans la rue chaque hiver. Quand la poésie donne la parole aux p etits, les nouveaux moujiks ou nouveaux serfs (les jeunes savent-ils enco re la signification de ces mots?) du seigneur Libéralisme , tout en bas de l’échelle sociale, sur qui l’on marche au sens figuré sans les