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Affichage des articles du 2016

Béatrice LIBERT : L'Aura du blanc

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Béatrice Libert, auteure belge, ayant reçu en 2014 le Prix Jean Kobs de l'Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique, pour son recueil poétique Écrire comme on part , vient de publier aux éditions Le Taillis Pré L'aura du blanc . Ce livre, loin de tout ésotérisme auquel le titre pourrait faire penser, met en miroir deux poèmes par page, le tout en sept vers (5+2 puis 4+3). Tout le charme de cet ouvrage est de placer, dans le blanc qui sépare ces deux textes, le halo qui les joint dans l'interrogation du lecteur. Béatrice Libert cherche plutôt à offrir un halo aux mots. Exemple de ce genre de poème-halo : Les mots où je dormais Se sont éveillés à ma place Et la nuit a rangé Mes songes dans sa poche Il suffirait de quelques branches En fleurs et nous accomplirions Le plus pur des voyages Dans ce rêve aussi, peut être une clé pour les encres de Motoko Tachikawa qui Illustrent superbement ce be

Gérard CLERY, Parcours : approches, anthologie, entretien

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Gérard Cléry , premier volume de la collection Parcours aux éditions Spered Gouez Marie-Josée Christien aime à faire découvrir les talents méconnus. Les éditions et la revue Spered Go uez qu'elle anime ont cet esprit sauvage qui les tient dans la liberté financière et l'indépendance de toute mode. Cette indépendance qui permet de mettre en lumière des auteurs injustement peu connus. Dans sa collection Parcours, nouvellement créée, elle regroupe biographie, entretien, recensions et anthologie afin de permettre une découverte totale d'un auteur. Pour ce premier numéro, c'est sur Gérard Cléry qu'elle a choisi d'orienter les projecteurs. Parce que Gérard Cléry n'occupe pas le devant de la scène poétique dans les émissions de radio, les maisons de la poésie, les marchés du livre, les festivals, il faudrait qu'il demeure inconnu et que son travail exigeant d'artisan des mots reste enfoui à jamais loin de nos appétits de décou

Louis Bertholom - Gaëls

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LES PORTES DE L'OUBLI Portes bleues blanches jaunes vitres secrètes rouges que traversent les lampes Façades de musées aux entrées nirvanesques             que cachent-elles             dans la course des taxis             des maisons mauves ? Appel d'un ailleurs quand la pluie ricoche             sur les tuiles rousses Des colonnes extravagantes promettent             des paradis de « spirits » tourbeux Pousser ces portes charnues              de l'oubli à la fraternité              où philosophies de tout de rien               s'évaporent au whiskey Églises profanes aux calices de noires Guinness sanctuaires de liesses des lèvres blanchies               de mousse volent dans la pénombre              aux murs clinquants La plainte primale des uilleann pipes se glisse dans le brouhaha vespéral               source soudaine d'un bois fatigué Univers à chaque fois unique               dansent les pintes               gît le

Nicolas Le Golvan – Psaume des psaumes

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Avant d'ouvrir ce livre intitulé Psaume des psaumes , j'appréhende de ne rien y appréhender justement. J'ai peur que ma volonté de me maintenir à l'écart de toute religion me soit un handicap pour apprécier ce nouvel ouvrage publié par les éditions La Sirène étoilée. Mais bon, je suis vite plongé dans la mort d'un David que l'auteur tient à ne pas présenter précisément. Mais avec ce titre on est obligé de penser à ce roi David, présent à la fois dans la la Torah, la Bible et le Coran. Et si la poésie pouvait réunir les trois religions dans une même vision de la mort injuste ? Et si l'amour quel qu'il soit était chanté par tous ? David le bien aimé est mort. Son amant est partagé entre le désir de rendre hommage «  Comme si on devait aux morts ces égards et ces vers que personne n'a donné aux vivants  » et celui de garder le silence  « Et pourquoi donc parler ? / le silence suffit au feu à disposer de toi  ». Il veut s'appliqu

Jacques Josse - Au célibataire, retour des champs

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En treize poèmes datés du 25.11.2013 au 13.03.2014, Jacques Josse poursuit son travail d'élégie aux petites gens, dans un petit ouvrage, édité par Julien Bosc dans un format qui n'est pas sans faire penser aux plaquettes rouges des éditions Wigwam , qu'animait Jacques Josse il y a quelques années. Jacques Josse, «  arpenteur de solitudes  » selon le regretté Ronald Klapka, évoque ici avec pudeur le quotidien d'un de ces anonymes à la «  vie rêche  », comme hors du temps au «  visage torturé  » et aux «  yeux éteints  », un de ces transparents qui traversent le monde avec «  sa part de ténèbres. Son feu intérieur  ». Ces gens de la campagne avec «  l'horizon à hauteur des talus  », si souvent moqués et pourtant si remplis d'humanité et à l'âme toute aussi noble. [...] Demande au cheval mort qui tire depuis toujours dans sa mémoire la même charrue aux socs usés de continuer à lui labourer le crâne pour y semer ces idées noires que

Guénane – Au-delà du bout du monde

Au-delà du bout du monde il y a « la fin de la terre » qui « n'est pas le début du ciel ». Au-delà du bout du monde il y a les « houles des Cinquantièmes Hurlants » et autres lieux pétris de notre imaginaire. Au-delà du bout du monde il y a le nom insubmersible de Magellan. Au-delà du bout du monde on peut « embarquer pour l'australité » vers des « tortures géographiques » et une « lumière crue ». Au-delà du bout du monde il y a des cormorans des albatros, ces poètes qui « déploient leurs talents » « dans le lit du vent ». Au-delà du bout du monde il y a les « lubies du Williwaw » cette « gifle descendue des Andes ». Au-delà du bout du monde il y a des « courants qui se contredisent » et des mots à y « chaluter ». Au-delà du bout du monde il y a des « marins et poètes » « passeurs de peines ». Au-delà du bout du monde il y a une langue yaghane qui se meurt aux bord des « eaux millénaires » où leurs barques savent « décryp

Laurent Girerd – Le Millier d'arbres sous le regard

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Quand Laurent Girerd se fixe comme mission de rendre aux cerisiers les pétales envolés, l'on se dit qu'il y aura bien de la poésie dans ce nouveau tirage des éditions Le temps qu'il fait. Faire mission d'un impossible n'est-il pas ce qui honore l'écrivain ? Et quand celui-ci s'astreint quotidiennement à «  faire ses exercices d'admiration  » nul doute que l'écrivain se fait poète. Avec ce voyage au Japon, Laurent Girerd souhaite aller fêter Hanami, le retour sacré du printemps où les japonais, se rassemblent sous les «  nuages roses et flottants » des cerisiers en fleurs. Dans ce recueil de courtes proses poétiques, Girerd ne cherche pas à fabriquer une énième japoniaiserie haïkisante. Car, même si j'aime sa fulgurance et sans faire de basho bashing, je commence à me lasser des haïkus. Sans doute qu'à force d'ateliers d'écritures, il s'est tellement répandu qu'il en a perdu justement sa fulgurance... Ici, sur

Sabine Péglion - Le nid

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Dominique Sierra, directrice des éditions la tête à l'envers, vient de publier le dernier ouvrage de Sabine Péglion, Le nid . Une élégie bouleversante. « L es enfants ont quitté la maison, le nid est vide désormais  » C'est par cette phrase entendue par l'auteure que commence ce livre avec un texte introductif nous donnant sans doute quelques clés de lecture. Mais dès les premières strophes, le lecteur sent que ce nid n'est pas que le cocon douillet duquel les enfants s'envolent, mais qu'il annonce quelques profondes souffrances : « Attente ou résignation / il hésite […] Ombre noire déchiquetée / transpercée d'étoiles // elles y sombrent / une à une » Car le nid se fabrique avec de petites brindilles et des plumes mais aussi avec les branches noires de la souffrance : «  En toi / gît à présent ce nid / suspendu //matrice indéfectible / nid vide / inflexible au centre / de toutes tourmentes. » Vus du nid « l es visages d'enfants / en abse

Jean-Luc Despax - 9.3 blondes light

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Despax fume un max. 93 cigarettes sans dormir (un peu moins que les 113 du pote-poète HFT, lui aussi Très Haute Tension dans les mots. Oh mais laisse allumé tes clopes en ce monde clopin-clopant. 93 cigarettes, calibre 9.3, fumer tue (les espagnols plus prudents : fumar puede matar). Écrire nuit gravement à votre santé et celle de votre entourage. Une cigarette allumée éclaire les visages, et si le poème en faisait autant? Dans son dernier livre, Despax allume, il allume les visages de leur feu intérieur, allume les regards sur le monde actuel et ses zones d'ombres parfois érogènes. Ici on ne chipote ni ne vapote avec un ersatz de pensées light. Tout est dit cash. La libre circulation des biens et des malles de billets. La libre circulation des hommes mais pas de leurs idées. Liberté de penser/fumer. Société de consommation, consolation à la con, cons sommés de consommer. Despax crame du poème pour se moquer des incultures ("le coca zéro de l'écriture"... )

Déborah Heissler – Sorrowful songs

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Sorrowful songs. Cela sonne bien. Ce pourrait être un titre de Léonard Cohen ou de Bob Dylan. Mais non, ce titre fait référence à une composition d'Henryk Górecki de 1976, la Troisième Symphonie, Symphonie des Chants Plaintifs ou Symphony of Sorrowful Songs. De la musique en tout cas, il y en a beaucoup dans les ouvrages de Déborah Heissler. Et avec son écriture profonde et fragile, où les cordes sensibles du piano se tissent des fils intimes de l'émotion brute, Déborah Heissler nous livre à nouveau une belle polyphonie en trois actes. Autour de la thématique du deuil de l’Être aimé, «  Toucher absolu de la distance qui nous sépare désormais », « Toi rien, puis toi exactement. Plus rien de toi que / nous. Tu – à la chute du jour, non moins brûlante.» nous retrouvons Blanche, la musicienne, entraperçue déjà dans le premier ouvrage de Déborah Heissler, près d'eux, la nuit sous la neige, publié il y a dix ans aux éditions Cheyne et qui a reçu le prix de poésie de la

Marc Baron - Dans le chemin qui s’ouvre

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Marc Baron est un poète discret, posant ses mots entre Drôme et Bretagne et en particulier Fougères où il fut le créateur en 1985 du Salon du livre pour la jeunesse . Son dernier ouvrage "Dans le chemin qui s'ouvre" est publié aux éditions Vagamundo. Gilles Baudry dans sa préface nous prévient «  Marc Baron emploie la « force douce de l'humilité  » et effectivement les poèmes de Marc Baron parlent de moments simples, simplement quotidiens et sans forfanterie «  Je ne suis rien de plus / qu'une herbe sur le seuil », « Le poème se donne / à qui fait le vide dans son orgueil  »... Composé de deux ensembles de poèmes, cet ouvrage est marqué par le temps. L'aujourd’hui bien sûr «  Le poème est toujours au présent  », mais aussi celui qui file trop vite «  Mes poèmes je les muscle aussi / avec les poids et les haltères / de l'urgence de vivre  ». De ces instants simples, glanés la nuit dans ses conversations solitaire avec sa lampe allumée, l&#