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Affichage des articles du 2017

Philippe Jaffeux – Glissements

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Philippe Jaffeux et ses jaffeurismes, suite... Toujours très prolifique Philippe Jaffeux vient de publier aux éditions Lanskine Glissements. T oujours le même mode opératoire une multitude de phrases sorties d'on ne sait quel cerveaugiciel en surchauffe, mis en forme façon Oulipo. Un renouvellement incessant d'exercices de style à la recherche d'une langue à réinventer et d'une écriture à faire exploser. Une sorte d'"Écriture mutante" d'un "monde illusoire" et d'un "temps inconnu". Mais ce recueil ne se résume pas à cet exercice de style. C'est une vraie réflexion sur les glissements de formes et leur impact sur la langue. Et ces glissements de langue opèrent aussi quelques dérapages dans notre façon de lire et donc d'appréhender ces textes. Car attention, ici chute de lettres, inversions de syllabes : " Tebê explore une inversion de syllabes au risque de définir la sauvagerie d'un règne

Florent Dumontier - Sur le perron glissent des spectres d'ombre

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Etudiant en philosophie et en théologie des arts à  Paris, Florent Dumontier a reçu en 2015 le prix de la Crypte - Jean Lalaude pour son ouvrage Sur le perron glissent des spectres d'ombres. Né en 1989, ce jeune auteur démontre d'ores et déjà une maturité à la fois dans son écriture et dans sa compréhension du mysticisme et dans la recherche de sens à la vie.  Y compris dans le titre, avec ce perron sans doute placé sous l'influence du mystique Péguy, ce livre fourmille d'images bibliques  : le pain, le ruisseau, l'oiseau, la lumière, les ténèbres, les cieux, " marche les mains ouvertes " "n ous sommes les veilleurs espérant le passage " et la présence du Père " Le regard posé sur l'univers / L'enfant sonde l’œil du Père parmi les étoiles " C'est un livre où la lumière travaille, à la fois dans les mots et leur symbolique mais aussi dans l'espace de la page. Parfois même, la lumière se faufile entre les l

Alain Roussel - Un soupçon de présence

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Dans toute son œuvre déjà conséquente, Alain Roussel aime à jongler avec son imagination pour faire se télescoper tous les mythes et les idées. Dans ce soupçon de présence, édité par Laurent Albarracin au Cadran Ligné, il interroge la place de sa présence au monde à partir de ses cinq sens. " J'existe. J'ai conscience que j'existe. A part cela, l'énigme est totale. Je ne suis au monde que par mes sens. " A partir de l'observation d'un arbre et d'un oiseau par la fenêtre, il verse, par la pensée, sur cette scène un soupçon (une pincée) de présence et de relation intimement liée entre l'auteur et ses deux vis-à-vis. Bien sûr, aucune démarche scientifique dans ce propos mais plutôt une quête poétique " en activant le principe d'analogie, j'ouvre des portes, des fenêtres, je crée des courants d'air dans ma façon d'appréhender le monde ." Alain Roussel fait sienne cette phrase d'Arthur Rimbaud : " Le Poète s

Joseph J. Guglielmi

corps noir collobert elle plus rien où placer le miracle du nom que le non fruit saccadé fait tache Extrait de  Autre notions d'avril in revue rehauts n°22 (octobre 2008)

Emilien Chesnot - Il est un air

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Après Faiblesse d’un seul publié en 2015 aux éditions Centrifuges, Emilien Chesnot (né en 1991) vient placer son jeune âge comme un nouveau regard sur ce que devrait être la poésie : une recherche d’une autre façon de voir, avec le regard de la jeunesse “ Chaque oeil au singulier d’un monde / ouvert ”. “les yeux / ce qui dépasse le plus / du corps / avec et plus loin / qu’un simple arriéré / de perception”. Le jeune poète veut développer un “regard matière” avec sa propre façon de voir au delà des apparences “ glissant / sous l’aspect des choses”, “dans une transparence / restée sans contraire”. Mais Emilien Chesnot cherche à voir l’invisible en convoquant tous ses sens, au-delà de la vue. “le sens / va dans l’épuisement / du sens”. Et le peintre Jean-Noël Bachès vient conforter cette tentative de perception extra-sensorielle avec de belles peintures, soulignant parfois visuellement les assonances du texte. Une complicité entre le peintre et le poète que Claire Per

Marie-Noëlle Agniau, Mortels habitants de la terre

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J'aime les quatrièmes de couverture qui disent tout sans rien en dévoiler. Qui ne font qu'attraper le lecteur par le mystère. " Assumer par le poème la disparition de l'écriture cursive et la mise en écran du monde, il le faut au moment où meurt la mère qui vous a enfantés : ne pas revenir est la règle du vaisseau. " Tout un programme alléchant pour qui aime les mots, avec ce nouvel ouvrage publié par les éditions l’Arbre à paroles, avec en couverture une illustration mystérieuse de Benjamin Monti.  Même si parfois le lecteur peut se sentir dérouté (mais n'est ce pas le propre d'un voyage réussi ?), le vaisseau dans lequel Marie-Noëlle Agniau nous emmène est d'une inventivité rare qu'il faut absolument signaler.  Une double disparition donc, avec toujours la notion de voyage et de nombreux allers-retours entre matériel et immatériel. A commencer par la contrainte sous laquelle sont placés tous les poèmes : débuter tous par " Est une

L’Orpiment, une nouvelle collection de poésie aux éditions le Réalgar

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Le Réalgar, maison d'édition stéphanoise, tire son nom du composé chimique, dérivé de l’arsenic, extrait entre autres dans la mine Ricamarie, non loin de Saint Etienne. Mais le réalgar est également cité par François Villon dans sa Ballade des langues ennuyeuses (ou venimeuses…)  " En réalgar, en arsenic rocher, en orpiment, en salpêtre et chaux vive, en plomb bouillant ". Il était donc tout naturel d’entamer l’aventure d’une nouvelle collection en la nommant l’Orpiment. L’orpiment est aussi un dérivé de l’arsenic, sauf qu’il est jaune et que le réalgar est rouge. C’est Lionel Bourg en alchimiste moderne qui va transformer cet arsenic en poésie, en dirigeant cette collection qui proposera quatre ouvrages par an. Antoine Choplin est le premier à explorer ce nouveau filon avec son ouvrage également très minéral : Tectoniques, illustré par les dessins de Corinne Penin). Olivier Deschizeaux est le deuxième avec une tectonique plus intérieure avec « et la mort comme reine » da

Esther Tellermann – Éternité à coudre

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Esther Tellermann fait partie des poètes qui peuvent faire peur. Si un lecteur, au hasard des rayons du bonne librairie, et attiré par ce si beau titre, venait à ouvrir son dernier ouvrage, il risquerait de refermer aussitôt en affirmant, péremptoire : « c'est nul, je n'ai rien compris. » C'est donc à ce lecteur inconnu que je souhaiterais m'adresser pour tenter de lui donner quelques clés afin que lui aussi puisse accéder à cette éternité à coudre. En effet, Esther Tellermann est une grande poète française et il serait dommage de passer à côté de la découverte de sa poétique mystérieuse et sombre certes, mais aussi pleine d'échos intimes qui font sourdre la lumière dans une curieuse alchimie de mots et de rythme. Eternité à coudre , édité aux éditions Unes, vient confirmer le talent d'exploratrice de l'âme humaine d'Esther Tellermann. Sur la forme, Esther Tellermann privilégie toujours les formes courtes et minces dans un ryt

Stéphane Sangral – Circonvolutions

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Fidèle aux éditions Galilée, Stéphane Sangral est un poète, philosophe et psychiatre, qui fouille dans les méandres de l'être, les circonvolutions de l'âme et les boucles entre le je et le soi. Il y a dans ces Circonvolutions (Soixante-dix variations autour d’elles-mêmes) , une mathématique du cercle infiniment vicieux voire vicieusement infini. Tout un délice pour qui aime se perdre en soi et se retrouver porté par un tourbillon poétique. Sangral cherche le nœud, où mathématique, philosophie et poésie se rejoignent. Dans une topologie typographique toute personnelle, Sangral cherche le point d'équilibre en ses circonvolutions autour de ses déséquilibres. Dans le vertige du langage, Sangral d éconstruit le signifié " Seule la déconstruction véritablement construit " et pousser l'expérience jusqu'à effacer ses textes en les laissant " s'effondrer ". Quand " le sens tombe dans les phrases que je n'ai pas écrites ". Ces

Paul Quéré – Suite bigoudène effilochée

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Les Editions Sauvages font bien de ressortir de l'oubli l’œuvre du poète Paul Quéré. Malgré la mort, c'est comme une survivance arrachée à un futur tenace qui nous est proposée avec la réédition augmentée de Suite bigoudène effilochée. Paul Quéré fait partie de ces poètes discrets qui, préférant « T out simplement : être! Le reste n'étant que fioritures : penser, écrire, ou faire quoi que ce soit. » , ne survivent que dans la mémoire de ceux qui l’ont connu. C'est injuste et c'est pourquoi l'initiative de ses amis bretons des Editions Sauvages est non seulement louable mais également nécessaire. Pour que le travail de cet artiste complet (poète mais aussi peintre, céramiste, créateur de revues de poésie) soit remis dans la lumière. Bretagne, car Paul Quéré y trouva la terre de l'harmonie de sa présence au monde. Bretagne en ses sols insoumis, dans son quotidien de création : «  Création, créativité, pourquoi pas simplement Créiture? » .

Martin Wable - Géopoésie

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Je vous avoue, je me méfie des étiquettes, des classifications. Et la poésie n'échappe pas à cette règle de tout vouloir ranger sous une bannière, un étendard, un tiroir, un mouvement artistique. Alors quand un jeune auteur de 24 ans intitule son ouvrage Géopoésie, je suis un peu réticent. Qui est ce jeune auteur qui vient mettre ses pas dans ceux de Kenneth White? Martin Wable est donc né en 1992 à Boulogne-sur-Mer et vit actuellement dans les Landes. Créateur avec Pierre Saunier de la revue cosmoréaliste (encore une autre étiquette) Journal de mes Paysages , il a publié La Pinède (2012), Snobble et Le Livre de Wod ( 2015) aux éditions maelstrÖm, et Prismes (2014) aux éditions de la Crypte. Géopoésie a reçu en 2015 le prix de la vocation de la fondation Bleustein-Blanchet. Mais ici l'étiquette n'est pas usurpée, la voie indiquée par Kenneth White pour une géopoétique comme ouverture au monde n'est pas détournée par Martin Wable. Ce livre fonctionne

Guénane - La sagesse est toujours en retard

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Des conseils aux jeunes poètes, il y a eu ceux bien sûr de Rilke, de Swift, de Max Jacob, de Jacques Roubaud aussi avec son lombric, et sûrement beaucoup d'autres. Il y a aussi Bernard Bretonnière avec sa Lettre à un jeune P. et qui pourrait faire mieux que moi la liste des poètes-ayant-écrit-des-conseils-aux-jeunes-poètes. Il y aura désormais aussi Guénane et son dernier ouvrage paru chez Rougerie : La sagesse est toujours en retard . Je me méfie de ces tentations de dispenser son docte savoir en matière de poésie. Le mieux n'est-il pas pour un jeune poète de ne suivre aucun conseil. " N’écoutez les conseils de personne, sinon le bruit du vent qui passe et nous raconte l'histoire du monde ." ce n'était pas un poète qui a dit cela mais un musicien (Debussy) . Mais Guénane ne tombe pas dans ce travers du maître pouvant être suffisant avec son élève. Pas question pour elle de donner des leçons. Et donc quitte à passer pour un conseilleur